HISTOIRE DU KARATE-DO SHOTOKAI
Les racines
Dans son livre Karate et Kobudo à la source, Jean-Charles Juster précise: « Naha, aux temps pré-modernes, désignait un ensemble de localités qualifiées chacune de village. (…) La population était d’environ 3500 – 4000 personnes dont seulement 800 nobles environ. On peut donc dire qu’il s’agissait d’un lieu occupé par les gens du peuple: artisans et commerçants. Tomari, situé non loin de ce Naha historique, était un port en relation avec l’étranger, le lieu des marins mais aussi des interprètes. (…) Shuri, la ville royale de l’Etat des Ryukyu, est devenue de nos jours un arrondissement de Naha, mais ses habitants se considèrent tout de même différents de ceux des quartiers populaires qui formaient jadis cette ville. En tant que siège de la cour, elle abritait un grand nombre de nobles (…). On saisit donc aisément que les okinawanais de Naha se trouvaient facilement au contact des chinois originaires du Fujian installés au village voisin de Kume, ou même allaient directement dans la ville de Fuzhou pour certains du fait de leurs activités. Les personnes établies à Tomari avaient à portée de main des savoirs et objets d’au-delà des mers, tandis que les nobles de Shuri côtoyaient forcément les membres des ambassades chinoises du gouvernement de Pékin et les guerriers du Japon, au travers de relations formelles. Dans ces trois environnements, transitaient bien sur des techniques d’arts martiaux, à mains nues ou avec des armes, faisant qu’à Shuri, les nobles étaient influencés par les styles du nord de la Chine. Les individus de Tomari, quant à eux, fréquentaient des experts et combattants venant de divers horizons: chinois du Fujian, de Pékin ainsi que de Shanghai ou de Hongkong, mais aussi indonésiens, japonais, philippins. Les citadins de Naha, pour les plus riches, pouvaient payer les maîtres chinois lorsqu’ils allaient dans le Fujian ou bien se rapprochaient de professeurs en combat originaire de cette province vivant au village de Kume. »
C’est ainsi que les Tode de shuri et Tomari donnèrent naissance à l’école shorin-ryu alors que le Tode de Naha donna naissance à l’école Shorei-Ryu. De ces deux « ryu », découlent tous les styles de Karate qui existent aujourd’hui. On peut donc avancer que les buts premiers du Karate étaient l’éducation et l’auto-défense.
Durant toute cette période, le Tode n’était enseigné qu’en secret. Le maître de Shorin-ryu Anko Itosu (1831 – 1915) fut le premier, en 1905, à rendre le Tode (ou Kara-te) public à Okinawa. Il codifia certains katas (les séries pinan ou heian) et proposa d’en introduire la pratique, comme activité sportive, dans les écoles. On peut donc parler d’une véritable révolution démocratique de l’enseignement du Karate à Okinawa et l’importance des modifications pédagogiques et techniques qu’il apporta ainsi font d’Anko Itosu le véritable père du Karate moderne tel que nous le connaissons aujourd’hui.
Maitre Gichin Funakoshi (1868 – 1957)
Le Karaté commença d’être « exporté » et connu au Japon au cours des années vingt du siècle dernier grâce à Gichin Funakoshi. Ce dernier, originaire d’Okinawa, est né l’année de l’avènement de la nouvelle ère Meiji. Il fut l’élève de deux célèbres maîtres de Tode: Anko Itosu et Anko Asato. A l’époque où Gichin Funakoshi débute l’étude du Karate la pratique en avait été proscrite par le gouvernement. « L’entrainement ne pouvait s’effectuer que la nuit et dans la plus grande discrétion. »
Très tôt, Gichin Funakoshi compris tout l’intérêt d’une pratique sérieuse du Karate. Il n’est pas inutile de rappeler ici des propos qu’il livre dans son ouvrage Karate-do, ma Voie, ma vie. Le premier concerne la découverte des bienfaits de l’entrainement sur la santé : « Ce n’est qu’après quelques années de pratique que je remarquai à quel point ma santé s’était prodigieusement renforcée: je n’étais plus l’enfant chétif que j’avais été. J’aimais le Karate mais, plus encore, je me sentais lui être profondément redevable de mon bien être grandissant, et c’est à cette époque que je commençais sérieusement à considérer ma pratique comme un art de vivre. »
En 1922, âgé de 54 ans, il fut invité à présenter l’art de combat à main nue d’Okinawa – le « Karate jutsu » ou « Ryukyu Kempo » – au ministère de l’éducation japonais à Tokyo. Il s’agit de la première démonstration publique de Karate au Japon. L’incroyable succès de cette manifestation assura la diffusion de cette discipline dans le pays. C’est à la demande de Jigoro Kano, fondateur du Judo moderne, que Maitre Funakoshi accepta de rester à Tokyo pour y développer son art. Il adopta le système de grade en vigueur au Kodokan (le dojo de Jigoro Kano) et la première cérémonie de remise de « dan » de Karate eu lieu en 1924. A la même époque, Gichin Funakoshi commença l’étude du bouddhisme Zen. Il retravailla ses techniques du Karate conformément à l’enseignement célèbre qui dit que la forme est le vide et le vide est la forme. En 1929, ce changement de philosophie l’amena également à modifier l’idéogramme « Kara » du Kara-te. Désormais, du fait de l’influence de la philosophie Zen mais aussi de la montée du nationalisme nippon, « Kara-te » ne signifiera plus « main de chine » mais « main vide ».
Toujours dans Karate-Do : ma Voie, ma vie, il explique lui-même ce changement d’orthographe: « Kara qui signifie « vide » est vraiment le terme le plus approprié. D’abord, il représente le refus de recourir à d’autres armes que les mains et les pieds. De plus, le but des étudiants de Karate n’est pas seulement de parfaire leur Art mais aussi de purifier leur cœur et leur esprit de tout désir terrestre et de toute vanité. La lecture des écritures bouddhistes nous conduit à des idées aussi fondamentales que Shiki soku ze kù (Les choses, c’est le vide) et kù soku ze shiki (Le vide, c’est les choses). Le caractère Kù qui apparait dans ces deux maximes et qui peut aussi être prononcé Kara exprime la réalité ultime. »
Enrichi par la philosophie zen, maitre Funakoshi réaffirme qu’il ne considère pas le karate comme un simple système de techniques vouées à l’autodéfense (Jutsu). Il s’agit d’une Voie (Do) de réalisation spirituelle pour le pratiquant. Le but n’est plus de tuer mais de communiquer, l’adversaire se mue en partenaire, l’opposition en harmonie des corps et des énergies. Le Karate-Jutsu devient Karate-Do. Il est possible de dire qu’en réorientant son Karate de la sorte, maitre Funakoshi l’a « japonisé ».
Tous les Budo reposent sur les mêmes principes fondamentaux (le reishiki, le sen, le ma ai, la recherche d’Irimi etc.). Le Karate-Do tel que voulu par maitre Funakoshi ne fait pas exception. Sa vocation était donc bien d’élever sa pratique au rang de Budo en suivant l’exemple d’autres disciplines japonaises ayant subi la même influence Zen. On peut dater l’origine de ce vaste mouvement culturel de pacification et de spiritualisation des diverses techniques de combat au XVIIème siècle lorsqu’un célèbre maitre de sabre, Yagyu Munenori, influencé par les leçons du moine Takuan Soho, parla de « sabre de vie ».
En 1931, la Dai Nihon Butotukai, organisme officiel visant l’encadrement des Budo, reconnut quatre écoles de Karate: le Shoto-ryu de Maitre Funakoshi, le Shito-ryu, le Goju-ryu et le Wado-ryu. L’entrainement à la compétition fut promu mais Maitre Funakoshi s’y opposa. Zen et compétition n’étaient à ses yeux pas compatibles. Pendant ses cours, il interdisait également la pratique du Kumite, qui sont des entraînements de combat à deux. « Quelques jeunes techniciens enthousiastes pensent que le Karate ne se travaille que dans un Dojo avec un professeur. Ils ne sont pas de vrais Karatekas. Le bouddhisme nous enseigne que le monde entier est un Dojo et aucun de ceux qui veulent suivre la Voie du Karate ne doit l’oublier. Le Karate-Do, ce n’est pas seulement savoir se défendre mais plutôt être un bon et honnête citoyen. (…) Le Karateka, et l’être humain en général, doit cultiver la courtoisie et lui accorder plus d’importance qu’à la puissance et à la technique. »
En 1935, le premier dojo privé de maitre Funakoshi est érigé au Japon : le Shoto-kan, (maison de Shoto). Shoto, « la vague des pins », était le pseudonyme que s’était choisi Maitre Funakoshi pour signer ses poèmes en chinois. Le style de Karaté qu’il y enseignait fut donc naturellement appelé Shotokan. En 1936, fut constituée la Shoto-kai (association de Shoto) dont le but était d’organiser la vie du dojo et de soutenir Maître Funakoshi.
1945 fut une année noire pour Gichin Funakoshi. D’abord, au cours d’un bombardement américain dans la nuit du 10 au 11 Mars, le Shotokan fut détruit. Puis, le 24 Novembre, son fils Gigo, appelé à prendre sa succession, succomba à une infection tuberculeuse. Deux ans plus tard, en 1947, son épouse décéda et les autorités américaines interdirent l’enseignement et la pratique des Budo dont le Karate. L’avenir s’assombrissait. Finalement, Masatoshi Nakayama, l’un des fondateurs de la JKA (Japan Karate Association) réussit à convaincre les autorités de lever l’interdiction en leur faisant croire que le Karate était une boxe chinoise et non un Budo Japonais.
En 1958, un an après la disparition de Gichin Funakoshi, paraît la seconde édition de son livre Karate-Do Kyohan écrit vingt ans auparavant. Cette édition sera traduite en Français et en Anglais en 1972 par Maitre Ohshima avec l’autorisation de la famille Funakoshi représentée par l’association Shotokai. Cette nouvelle édition fut l’occasion de rappeler – à titre testamentaire – les éléments fondamentaux de la pensée du Maitre dont la photo orne tant de Dojo à travers le monde. Dans le chapitre intitulé La valeur du Karate, Maitre Funakoshi aborde d’abord le bénéfice qu’en retirera le pratiquant au niveau de sa santé : « En fait, un des avantages du Karate est le développement équilibré et harmonieux du corps. » Il aborde ensuite la question de l’auto-défense : « Nous ne devons avoir aucune intention de causer des dommages aux autres, mais nous devons éviter les ennuis. Afin de se protéger, on doit trouver une méthode qui permette au faible de se défendre contre des adversaires plus forts. La force du Karate est maintenant bien connue pour son efficacité. » Enfin, troisième et dernier point, l’auteur met l’accent sur les bénéfices spirituels liés à une pratique sérieuse et continue : « La souplesse de l’entrainement permet aussi d’effectuer d’énormes progrès sur le plan spirituel. Car, comme on le sait, si l’entrainement à n’importe quel art martial vient à être interrompu pendant six mois ou un an, aucun progrès ne peut être espéré sur le plan spirituel. La connaissance de cet art, la maitrise de ses techniques, le développement des vertus de courage, de courtoisie, d’intégrité, d’humilité et de contrôle de soi jusqu’à en faire la lumière intérieure qui servira de guide dans la vie quotidienne, tout ceci demande au moins dix à vingt ans et, si possible, une vie entière dédiée à l’étude de cet art. A cause de sa souplesse, qui permet un entrainement continu, je considère que parmi les arts martiaux, le Karate est l’un des plus adaptés à parfaire l’entrainement spirituel. »
Notons un dernier point à propos de cette parution: en 1956, soit une année avant sa disparition et deux ans avant que ne soit publiée la nouvelle édition du livre, Gichin Funakoshi rédigea une seconde préface à l’ouvrage. On le découvre inquiet de l’évolution sportive qu’était en train de prendre son art : « A la suite des troubles sociaux qui suivirent la fin de la deuxième guerre mondiale, le monde du Karate fut dispersé comme beaucoup d’autres choses. En plus de la constatation du déclin du niveau de la technique durant cette époque, je dois reconnaitre qu’il y eut des moments où je me rendis compte avec affliction de l’état d’esprit presque méconnaissable auquel le monde du Karate était arrivé, comparé à ce qu’il était au moment où je l’introduisit pour la première fois et où je commençai à l’enseigner. Bien qu’on puisse prétendre que de tels changements ne sont que l’aboutissement naturel de l’expansion du Karate-Do, il n’est pas évident qu’il faille considérer un tel résultat avec joie plutôt qu’avec inquiétude. C’est donc avec des sentiments mitigés de joie et de remords que j’ai surveillé la croissance du Karate et tenté d’en infléchir le cours dans la meilleure direction et je puis difficilement estimer l’influence que je peux encore exercer sur son évolution extrêmement fluctuante. »
Gichin Funakoshi s’éteignit le 26 Avril 1957 à l’âge de 88 ans. C’est l’association Shotokai qui fut désignée par la famille Funakoshi pour l’organisation des funérailles du Maitre. Mécontents de ce choix, les membres de la JKA décidèrent de ne pas y assister. Deux mois après sa mort, la JKA organisait la première compétition nationale de Karate.
Dès les années 1960, des élèves de Maitre Funakoshi se réunirent et créèrent une immense chaine de solidarité grâce à laquelle il fut possible, en 1975, de reconstruire le Shotokan détruit pendant la guerre. Ce dojo appartient encore aujourd’hui à l’association Shotokai.
Maitre Gigo Funakoshi (1907 – 1945)
Maitre Shigeru Egami (1912 – 1981)
Après la deuxième guerre mondiale, plusieurs élèves de Funakoshi, parmi les plus anciens (Nakayama, Nishima et Obata), préconisèrent l’adoption d’entraînements orientés vers la compétition, avec l’idée qu’il s’agissait là d’une excellente vitrine commerciale pour le Karate. Masatoshi Nakayama fonda en 1949 la JKA (Association Japonaise de Karaté) afin de promouvoir le Karate comme sport de compétition. Maître Funakoshi s’y opposa et lui refusa son soutien, ce qui n’empêcha pas la JKA de le nommer « instructeur d’honneur », honneur que maitre Funakoshi n’accepta jamais. Le Karate-Do n’est pas un Karate sportif et les buts de la compétition sont opposés à ceux poursuivis par la démarche zen. D’autant que l’orientation sportive de la JKA ne faisait pas que trahir l’esprit du Karate-do de Maitre Funakoshi, elle en modifiait également la forme. Comme l’explique Masatoshi Nakayama lui-même dans un entretien daté de 1982: « Quand je dis qu’il y a eu des changements, je veux dire qu’avec l’avènement des tournois de compétition nous avons trouvé qu’il fallait changer la forme avec laquelle certaines techniques sont appliquées en vue de leur exécution spécifique pour la compétition. »
tC’est ainsi qu’après le décès de son maitre en 1957, Shigeru Egami, l’un des élèves du cercle restreint de Gishin Funakoshi qui était resté fidèle à ses enseignements spirituels, prit la direction du dojo Shoto-kan et de l’association Shoto-kai et poursuivit ses propres recherches, non pas dans le sens d’une évolution sportive de l’art du Karate mais dans celui, opposé, du Budo.
Maitre Egami est né en 1912 dans la préfecture de Fukuoka. Il débuta le Karate en 1931 en entrant à l’université de Waseda où il devint le premier élève de Gichin Funakoshi dans cette université. En 1937, il était déjà nommé par O-sensei au comité d’évaluation technique du Shotokan. En 1945, au moment de la mort de Gigo Funakoshi, l’un de ses principaux partenaires d’entrainement, le niveau technique atteint par Shigeru Egami semblait incontestable et incontesté. A titre d’exemple, Shozan Kubota parle de son tsuki (coup de poing) en des termes élogieux: « Le tsuki de M. Egami était magnifique. Pour la plupart de ses élèves, sa technique était un modèle à suivre. » (propos cités par Kenji Tokitsu). A propos de ses techniques de jambes, Yukio Togawa se remémore: « Je vis Maitre Egami pour la première fois un soir à l’entrainement au dojo. Deux élèves s’entrainaient dans un coin: l’un attaquait librement, enchainant violemment les tsuki, l’autre bloquait avec ses pieds toutes les attaques en renvoyant les poings de son adversaire. Il gardait les mains sur les hanches et utilisait avec une mobilité surprenante ses deux pieds comme s’ils avaient été des mains. De temps à autre, il giflait avec son pied le visage de son partenaire. je fus tellement surpris que je demandai à mon copain du dojo: « Qui est-ce? » J’appris alors que c’était Egami. Je crois que, parmi tous les élèves de maitre Funakoshi, c’était lui le meilleurs dans la maitrise des pieds. » (ibid) Enfin, dans son livre sur les origines du Shintaido, Hiroyuki Aoki déclare: « Pendant la seconde guerre mondiale, Egami fut considéré comme le meilleur dans les arts martiaux au Japon par l’école de formation de l’armée à Tokyo. »
Pourtant, Maitre Egami s’était mis à douter, dès le milieu des années 1940, de l’efficacité réelle du tsuki de Karate et ce, malgré ces nombreuses années d’entrainement et de renforcement du corps. Il s’adonna alors à une expérience extrême: « Je voulais savoir si mon tsuki était vraiment efficace et comment il fallait faire pour en obtenir un qui le fut. Mais je ne pouvais pas le tester sur quelqu’un d’autre. Je n’avais qu’une solution: inviter toutes sortes de personnes à me frapper de toutes leur force sur le ventre pour étudier la qualité des coups. J’ai reçu les coups de karatekas, de boxeurs, de kendokas, de Judokas etc. Le résultat de cette recherche fut déplorable, car je constatai que le tsuki du Karate était le moins efficace. Ce que je dus reconnaitre me choqua: plus on avait pratiqué le Karate depuis longtemps, plus on l’avait pratiqué avec sérieux, moins le tsuki était efficace. Le plus percutant des coups était celui des boxeurs. Ce qui m’a le plus surpris, c’est que le coup de quelqu’un n’ayant jamais rien pratiqué était incroyablement percutant. » (propos rapportés par Kenji Tokitsu)
Il en chercha donc la raison. Un premier élément de réponse lui parvint un jour de 1953 où, s’entrainant avec Tadao Okuyama, il reçu un tsuki véritablement efficace. Ce coup avait été délivré avec une apparente absence de force mais le résultat fut dévastateur. Maitre Egami raconte: « Alors, en 1952 ou 1953, un ancien collègue m’a démontré une façon extrêmement efficace d’attaquer. J’ai été surpris. La différence n’était pas autant dans la forme, qui était très peu changée, mais dans le concept lui-même. En effet, le nouveau concept cassait tous les précédents. je me suis décidé à tout recommencer et à pratiquer selon ce nouveau concept. ma façon de m’entrainer changea complètement: les mouvements rigides d’un pantin articulé, devinrent des mouvements harmonieux et rythmés. Mais je ne commençais à remporter des succès qu’après des mois et des mois d’étude avec les jeunes karatekas. Ces jeunes progressaient rapidement et il était évident que j’avais beaucoup à apprendre d’eux. »
Il se remémora également la souplesse et la décontraction de maitre Funakoshi lorsqu’il frappait le makiwara. Maitre Egami compris alors que l’incessant renforcement musculaire auquel il avait soumis son corps toutes ces années avait eu pour effet de le raidir et de le contracter. Le résultat était alors inversement proportionnel aux efforts consentis. En conséquence, il modifia en profondeur ses entrainements, mettant l’accent sur la souplesse, la décontraction et l’élasticité des mouvements. Son objectif était de développer un maximum de force, d’énergie et de présence en restant le plus léger et le plus détendu possible. Toute entrave à l’harmonie et à l’unité du mouvement devait être écartée. Il chercha à frapper avec décontraction de façon à projeter l’énergie aussi loin que possible. Cette conception de l’efficacité lui avait été démontrée par Noriaki Inoue, neveu et premier disciple de Morihei Ueshiba le fondateur de l’aikido. Inoue, après sa rupture avec son oncle, devait fonder le Shinwa taido qu’Egami étudia dès la fin des années 1950. Fort de cette nouvelle conception, ses coups devinrent puissants et pénétrants. Ils rendirent nécessaires la modification des techniques de défenses devenues inefficaces à leur tour. « Je finis par conclure que la technique en Karate doit comporter de la concentration. Tout d’abord, je commençai par concentrer physiquement la force sur un seul point d’impact soit lors de l’exécution d’attaques, soit pendant les parades. Je commençai à concentrer ma force sur le point de contact du corps de mon adversaire. Au cours de cette recherche, j’ai compris que le problème de la concentration ne doit pas se limiter aux lois physiques et que le plus important est la concentration mentale. » Les changements apportés par maitre Egami étaient tels que l’on commença à parler de style Shotokai.
En 1967, lors d’un entrainement d’été à l’université de Chuo, Maitre Egami fut victime d’une crise cardiaque. C’est une technique de réanimation appliquée par Hiroyuki Aoki qui lui sauva la vie de justesse. Il dira de cette expérience: « En ce moment éphémère j’ai fait une expérience extraordinairement précieuse. Les conditions étaient celles d’un homme face à la mort: douleurs indicibles, souffrance, mélancolie. La détresse émotionnelle, la peur et l’anxiété s’étaient combinées en quelque chose de grave et de pénétrant. (…) Quand je me suis réveillé, la joie de vivre était extraordinaire: tout brillait autour de moi. C’était une impression réelle, le bonheur de sentir la vie. C’était l’acmé du plaisir, si bien que je voulais parler à tout le monde. (…) L’homme ne peut pas vivre seul, il vit de l’échange et du soutien mutuel. Voilà ce que j’ai compris. »
Adepte de la philosophie Zen imprégnant tous les Budo, maitre Egami poursuivit et approfondit les modifications philosophiques et techniques engagées par Maître Funakoshi. « Aujourd’hui la Voie du Karate a perdu sa qualité et elle s’est dégradée au point d’être considérée comme un « entrainement pour tuer ». Je dois contribuer à la remettre sur la véritable voie: c’est ce que voulais nous apprendre Maitre Funakoshi. Je pense que c’est là mon unique vocation puisque je suis adepte de la voie du karate. (…) Comment devra être le Karate-do, selon la méthode de la paix? Comment dois-je agir pour transformer d’un point de vue qualitatif la technique du combat en méthode de paix? Comment concevoir les techniques du corps? Comment dois-je aborder les problèmes de l’esprit? Jour après jour, je me suis entrainé en investissant toute ma vie pour affronter ces questions. Je me suis entrainé en sacrifiant ma vie afin de dépasser chaque jour mon entrainement de la veille. J’ai vécu intensément jour après jour sans me soucier du lendemain, retenant ma pensée ici et maintenant. Grâce au Maitre, à mes prédécesseurs et à mes élèves, je réussis à m’approcher des techniques que je recherchais. Si quelqu’un me demande: Est ce que tu continues de former des assassins? Je peux répondre non avec conviction. Je connais clairement la direction vers laquelle je dois avancer jusqu’à mon dernier souffle. »
L’antagonisme de ses vues d’avec celles de la JKA aboutirent à la scission des élèves de Maitre Funakoshi. Certains restèrent fidèles aux orientations philosophiques de leur Maître (Egami, Hironishi, Harada, Ohshima etc.), d’autres s’orientèrent vers un karaté moderne et sportif taillé pour la pratique compétitive.
On peut dire que le travail de Maître Egami apparenta totalement son Karate à un Budo. Avec le Shotokai, Shigeru Egami resta donc fidèle au style de karaté inspiré de la philosophie Zen tel que souhaité par maitre Funakoshi. « Celui qui veut trouver la voie du vrai Karaté ne doit pas simplement essayer de rester à côte de son adversaire, il doit trouver une unité avec lui. Il n’est pas question de tuer, pas plus que de gagner. L’entraînement du karaté consiste à ne faire qu’un avec le partenaire et à progresser ensemble. »
Maitre Egami présida l’organisation Shotokai jusqu’à sa mort en 1981. Il fut relayé ensuite jusqu’en 1995 par Genshin Hironishi. Son successeur, fut alors Jotaro Takagi, élève direct de Maitre Egami, capitaine de l’équipe de Karate de l’université de Chuo en 1947 et cadre dirigeant du groupe Mitsubishi. Depuis la disparition de ce dernier en 2016, le nouvel instructeur principal du Shotokan et chef de file actuel du Karate-Do Shotokai au Japon est Yoshinori Takita.
Maitre Tetsuji Murakami (1927 – 1987)
Maitre Murakami a commencé la pratique du karate shotokan à 19 ans avec Masaji Yamaguchi, l’enseignant de Karate du Yoseikan dojo de Minoru Mochizuki. Il y étudia également l’aikido avec Minoru Mochizuki ainsi que le iaido avec maître Shoe Sugiura et le kendo avec maître Kohishi Ogura.
En 1957, Tetsuji Murakami arriva en France à la demande d’Henry Plée, le pionnier du karaté en France. Il s’installa à Paris et mit sur pied des groupes d’entraînements en France, au Portugal, en Italie, en ex-Yougoslavie, en Allemagne et en Suisse. Au départ, il enseignait le Shotokan dans le style de Funakoshi.
En 1967, lors d’un voyage au Japon, Maître Murakami rencontra Maître Egami. Dans son livre publié en 1993, madame Egami donne des détails sur cette première rencontre: « Un jour, un monsieur appelé Tetsuji Murakami et présenté par M. Ohshima est venu nous rendre visite. Il était né dans la préfecture de Shizuoka et il enseignait le Karate en France. Son compatriote M. Mochizuki y avait aussi enseigné le Karate; cependant, ayant dû rentrer au Japon, M. Mochizuki avait demandé à M. Murakami de prendre sa place en France. Celui-ci y était donc allé pour une courte période, mais finalement ce séjour s’avéra bien plus long. Il vécut d’abord chez quelqu’un de très influent dans le milieu du Karate Français, tout comme l’avaient fait M. et Mme Ohshima. Selon M. Murakami, ce français influent le payait très peu et il avait du mal à subsister. Il nous dit: « J’ai signé un contrat sans en connaitre le contenu, voilà la raison principale des problèmes que j’ai eus, au début, en France. » M. et Mme Ohshima finirent par retourner en Amérique et M. Murakami parvint à trouver ses propres élèves. Mais M. Murakami avait quelques difficultés à les former et il hésitait sans trop savoir comment surmonter les obstacles. Alors, M. Ohshima lui dit « Retournez au Japon et entrainez vous avec M. Egami. » A ce moment-là, M. Murakami décida de rentrer au Japon. Il semblait avoir environ 40 ans, il était petit mais très élégant et faisait bonne impression sur les gens. Mon mari l’a beaucoup aimé et l’a beaucoup conseillé. Il commença à venir fréquemment chez nous. »
Maitre Murakami fut immédiatement conquis par les nouvelles formes enseignées Shigeru Egami. Il décida alors de réorienter sa pratique vers le style pratiqué par la Shotokai. Dans un interview accordé à la revue shoto, Maître Murakami déclare: « c’était une recherche faite en tâtonnant, dans les ténèbres, entouré d’objets très fragiles: je ne savais pas du tout par quelle direction démarrer. Au début, j’avais beaucoup d’inquiétude car je devrais probablement chercher pendant plusieurs années, mais après…qu’allais je trouver? Et si je m’apercevais que cela n’était pas bon, que devrais je faire? Quand même, après avoir beaucoup réfléchi, j’ai décidé de parier sur cette idée. Parce que j’ai senti vaguement que, dans ce Karate, se trouvait quelque chose que j’étais en train de chercher moi-même. »
Madame Egami poursuit: « M. Murakami dit qu’il voulait divulguer le Karate à Paris. Son dévouement au Karate séduisit le coeur de mon mari et il commença à l’enseigner. Lorsqu’il était au Japon, il est venu plusieurs fois chez nous pour pratiquer (…). Quand il retourna à Paris, mon mari commença à lui transmettre l’enseignement par correspondance, tout comme il l’avait fait auparavant avec M. Harada, et les lettres furent si nombreuses qu’elles seraient certainement suffisantes pour écrire un livre au sujet du Karate. »
Au moment précis où les dirigeants de la JKA décidaient d’inclure dans le Karate les disciplines fondamentales de la connaissance scientifique occidentale en plus de la pratique de la compétition sportive, Maitre Egami choisissait un autre chemin, comme il l’écrira lui-même en 1970: « Il faut dire que la situation actuelle dans le milieu du Karate est complètement dégradée. Je me sens aussi un peu responsable de cette situation. Dans ma jeunesse, j’ai pensé et j’ai agit suivant une ligne directrice: être efficace dans une situation réelle. Par conséquent, j’ai pratiqué principalement le combat libre, qui est la forme originelle de l’actuel combat de compétition. Pour que mes coups de poing soient bien intenses, je me suis entrainé au plus rigides des makiwara. Je me suis ainsi progressivement détourné de l’entrainement essentiel. Je ne comprends pas pourquoi le Karate continue aujourd’hui d’évoluer dans la direction erronée – qui était la notre il y a déjà plusieurs dizaines d’années – au lieu de suivre la bonne direction. Si on définit le Karate comme une pure compétition sportive, je n’ai rien à en dire. Mais n’est-il pas temps de réfléchir à ce que le Karate doit être, voire de le redéfinir? » (propos rapportés par Kenji Tokitsu)
En 1969, eut lieu la première édition du stage de Sérignan. Ce stage, organisé par Maitre Murakami chaque été sur la plage de Sérignan dans le sud de la France, était le lieu de rendez-vous annuel de tous ses élèves en Europe. En 1971, il crée l’association Murakami-kai dont l’objet est « d’élever la morale des pratiquants de karate en suivant l’esprit du Maitre Murakami. » En 1976, Maitre Murakami est désigné par Maitre Egami responsable du Karate Shotokai pour l’Europe. Toujours en 1976, sur l’invitation de Maitre Murakami, Maitre Egami se rendit pour la première fois en Europe. Maitre Egami écrira dans une lettre (parue dans Shoto n°9, 1994): « Invité par Murakami, mon ami et collègue en Karate, nous avons voyagé du mois de Mai au mois de Juin en Europe. (…) J’ai pu assister à des entrainements en France, Italie, Portugal. (…) J’ai un grand espoir dans l’avenir du Karate-Do en Europe, et je tiens à remercier Murakami qui l’a dirigé jusqu’à aujourd’hui. » Un second voyage du même type sera organisé en 1978. Ces voyages seront l’occasion, pour Maitre Egami, de constater l’énorme travail de diffusion du Karate réalisé par Maitre Murakami mais également sa capacité à créer, organiser et fédérer un groupe dans la durée et à dimension internationale.
Madame Egami, dans son livre, relate les conditions d’organisation du voyage de 1976. Ces propos témoignent du lien particulier unissant Maitre Murakami à Maitre Egami: « Quelques temps auparavant, mon mari avait dit à M. Hiruma (un de ses élèves installé en Espagne): « Prendre l’initiative de m’inviter à visiter l’Europe n’est certainement pas chose facile. Organisez donc la visite avec M. Mitsusuke Harada et avec M. Murakami. » Ce conseil de mon mari n’a eu aucun effet à en juger par les années qui se sont écoulées. M. Murakami nous a dit: « J’ai contacté plusieurs fois MM. Harada et Hiruma, mais je n’ai pas obtenu de résultat. » Nous croyions bien comprendre ce qui se passait. Même au Japon, il n’était pas facile d’établir des relations entre Sapporo, Tokyo et Fukuoka; entre les pays européens c’était encore bien pire – établir des liens entre des villes aussi lointaines que Paris, Londres et Madrid… Mais ce n’était pas la vraie raison et, plus tard, nous avons appris la véritable: M. Harada ne faisait pas confiance à mon mari. Mon mari ne semblait pas le prendre trop à cœur, mais c’était en fait de là que venait le problème. La vérité, c’est que M. Harada n’a pas voulu prêter l’oreille à MM. Murakami et Hiruma au sujet de l’invitation et de l’organisation du voyage. M. Hiruma s’est senti embarrassé du fait de cette situation et les contacts n’ont eu aucune issue. Ces circonstances ont ennuyé M. Murakami et il décida de nous inviter lui-même. »
En 1981, Maitre Murakami se rendit au Japon dès l’annonce du décès de Maitre Egami afin d’assister à ses obsèques. par la suite, il laissera plusieurs témoignages de les échanges qu’ils entretinrent au cours des années. A titre d’exemple, les lignes qui suivent ont été publiées dans la revue Shoto n°3, 1991: « Un jour où Maitre Egami était en Europe, il me demanda « quand as tu volé mon karate? ». Cette question était brutale et je n’avais pas pensé que j’avais le talent nécessaire pour le voler. Donc, après avoir hésité un peu, j’ai essayé de lui répondre: « Oui, j’ai imité simplement votre Karate… ». Le Maitre m’a interrompu en m’expliquant: « Ah! oui oui. C’est déjà bien parce que tout commence par l’imitation. » et il m’a expliqué sa nouvelle méthode de travail. »
Maître Murakami décèdera prématurément en 1987 à Paris, quelques mois après son retour d’un voyage au Japon entrepris avec un groupe d’élèves européens.
Maitre Mitsusuke Harada (1928 – 2021)
En 1955, Maître Harada accepta un poste dans une banque au Brésil et y exporta le Karate Shotokan pratiqué par le groupe Shotokai. Peu avant la mort de Maitre Funakoshi, et face à l’augmentation du nombre de ses élèves, Maitre Harada demanda à Maitre Funakoshi l’autorisation d’affilier son dojo à la JKA. Il fut surpris par la réponse: Maitre Funakoshi, lui demanda d’éviter la JKA et de fonder plutôt sa propre organisation. « Funakoshi avait apporté au Japon un art venu d’Okinawa et auquel il attribuait une grande valeur individuelle et sociale. Néanmoins les choses n’avaient pas tourné comme le vieux maitre l’aurait voulu, et il pensait que cet art avait été en grande partie gâché et corrompu. »
Toujours du fait de ses obligations professionnelles, maitre Harada quitta le brésil pour un long périple de plus de deux ans à travers l’Europe qui devait le conduire jusqu’en Angleterre où il s’installera définitivement (son passage en France sera marqué par quelques difficultés avec les autorités administratives et des dissentions avec Maitre Murakami).
Maitre Harada arriva en 1965 à Londres où il commença à enseigner dans le Dojo d’Abbe Kenshiro sensei, un maitre de Judo et d’Aïkido (à 19 ans, il fut le plus jeune 5ème dan de judo de l’histoire du Japon et il était élève direct de Morihei Ueshiba). Il y créera l’organisation KDS (Karate-Do Shotokai) et, au début des années 1970, maitre Harada put organiser des stages au sein de l’université de Keele, profitant ainsi d’installations modernes et plus appropriées.
Le Karate de maitre Harada est resté proche de celui pratiqué avant son départ du Japon avec maitre Egami. Il semble, de son propre aveu, qu’il ait eu du mal à comprendre les orientations prises par le groupe Shotokai à partir de la fin des années 1960, alors qu’il était parti du Japon depuis une dizaine d’années. A ce sujet, il déclare dans son livre Réminiscences: « En 1967 je suis retourné au Japon et j’ai découvert à la faculté de médecine de Chuo un type de Karate que je n’avais jamais vu. Je n’arrivais pas le moins du monde à comprendre ce qu’ils étaient en train de faire, mais je faisais confiance à Egami. En 1968, au stage d’été Shotokai, ici en Grande Bretagne, certains étudiants de Chuo sont venus participer, et afin de comprendre ce genre de Karate, je les ai laissés diriger le stage. Hiroyuki Aoki avait créé le Sogo Budo ou le shintaido à partir du Karate. Ces deux termes font références à la même chose et cette nouvelle évolution m’a causé bien des problèmes. Aoki était l’élève d’Egami, comme moi, mais j’étais aussi l’élève de Funakoshi. Les différences fondamentales dans les approches eurent, je dirais, des effets négatifs dans la mesure où certains enseignants Shotokai professaient l’ancien et le nouveau système en même temps: « Aujourd’hui nous enseignons le Karate traditonnel, demain nous ferons le Sogo-budo », voilà le genre de chose qui se passait. Un jour les élèves portaient le Hakama, le lendemain un karate-gi. J’ai alors demandé conseil à Egami, « Comment s’entrainer? » mais il n’a rien dit du tout. Et lorsqu’il est mort le 08 Janvier 1981, j’en fus très attristé, mais j’ai aussi éprouvé un fantastique sentiment de liberté. « A présent je peux créer mon propre Karate » me suis-je dit. »
Il semble donc que Maitre Egami a toujours considéré le Shotokai comme un laboratoire de recherche concernant le Karate plutôt que comme un style codifié et arrêté, à conserver et à transmettre tel quel. A la suite de l’histoire relatée ici, on peut en distinguer au moins trois périodes d’élaboration : La première concerne le Karate tel qu’enseigné par les Maitres Egami, Okuyama et Hironishi dans les années 1950. Ce Karate est sans doute celui qui servait de référence à maitre Harada. La seconde période est caractérisée par les apports ultérieurs d’Egami sensei – disons des années 1960 à 1980. C’est ce Karate qui a marqué et influencé les Maitres Murakami, Miyamoto et Aoki (ce dernier s’est éloigné du Karate pour créer sa propre Voie). Enfin, la dernière période renvoie aux différentes directions prises par le Karate Shotokai depuis la disparition de Maitre Egami, c’est à dire du début des années 1980 jusqu’à nos jours. Il s’agit des recherches et expérimentations diverses menées par les différents groupes s’inscrivant, au Japon comme en Occident, dans les pas des Maitres Harada, Murakami, Takagi et Hiruma.